Élections provinciales 2022 au Québec : survol des enjeux touchant les aînés

29 septembre 2022
Groupe de personnes âgées.
En raison des élections provinciales du Québec qui sont à l’horizon, l’Association nationale des retraités fédéraux explore ce que les membres, les personnes à la retraite et les personnes âgées de la province doivent savoir.
 

Alors que la campagne au Québec entre dans sa dernière ligne droite avec une CAQ toujours dominante et une opposition morcelée, force est de constater que la question des aînés n’a pas autant occupé le devant de la scène médiatique que la pandémie aurait pu le laisser imaginer. 

Toutefois, les programmes comportent un certain nombre de mesures particulières aux personnes âgées (soins à domicile, crédits d’impôt pour les personnes de plus de 70 ans, soins dentaires, etc.). Les quatre partis d’opposition promettent également une commission d’enquête indépendante sur les décès en CHSLD. 

Mais lors des trois événements médiatiques majeurs de ces dernières semaines, peu de questions ont porté directement sur les aînés. Il appartenait alors à chaque candidat et candidate de les mentionner. Voici un petit tour d’horizon des questions, des promesses et des critiques des cinq partis.

 

Cinq chefs, une élection

Le 4 septembre, les chefs des cinq principaux partis politiques ont été interviewés par les journalistes Anne-Marie Dussault, Céline Galipeau et Patrice Roy, lors d’une émission spéciale de Radio-Canada.

François Legault

Le premier ministre et chef de la CAQ François Legault aborde la question des aînés à plusieurs reprises. Interpellé sur les baisses d’impôts et les chèques promis alors que des besoins se font sentir dans les hôpitaux et les CHSLD (où on autorise à nouveau les chambres multiples), il souligne les difficultés des « personnes âgées qui ont de petites pensions » face à l’inflation, pour expliquer une aide ciblée allant jusqu’à 2000 $.

Il se montre critique des promesses de ses rivaux en matière de soins à domicile (pas réalisables à court terme à cause du manque d’infirmières, dit-il), met en avant l’augmentation des soins pendant son mandat et explique « y aller graduellement. » 

Interrogé sur les listes d’attente en CHSLD et sur le coût élevé de construction des maisons des aînés, il répond : « C’est eux autres qui ont bâti le Québec d’aujourd’hui. Il n’y a rien de trop beau pour nos aînés. » Il réutilisera cette phrase lors du débat du 15 septembre.

Dominique Anglade

La chef du PLQ ne fait l’objet d’aucune question ciblée au sujet des aînés, mais en parle dans le cadre des dépenses qu’elle promet pour aider la classe moyenne (ce qui comprend une allocation pour les aînés de 2000 $).

« La seule chose qui n’augmente pas aujourd’hui, c’est le revenu de nos aînés », dit-elle. Elle répétera souvent cette phrase dans les débats du 15 et du 22 septembre.

Paul St-Pierre Plamondon

Alors qu’il fait un tour d’horizon de son programme, le chef du PQ décrit sa formation comme « le seul parti à avoir un plan pour assurer la dignité de nos aînés. »

Interrogé sur son programme de 3 milliards de dollars pour les soins à domicile, décrit comme irréaliste par M. Legault, il dit se baser sur les meilleures pratiques. Il critique le coût des maisons des aînés, qu’on ne pourra pas construire pour tout le monde.

« Le modèle où on mise sur le béton est financièrement non viable », dit-il. Il mise, comme l’Europe, sur des entreprises d’économie sociale pour apporter des soins en dehors des hôpitaux et des institutions. « On augmente le nombre de personnes capables de s’occuper de nos aînés. »

Gabriel Nadeau-Dubois (QS) et Éric Duhaime (PCQ) ne sont pas interrogés sur les aînés et n’en parlent pas. M. Duhaime mentionne tout de même le besoin d’une enquête publique sur les décès en CHSLD.
 

Le premier débat

Le premier débat de la campagne électorale du Québec a eu lieu le 15 septembre. Le chef du Parti conservateur du Québec Éric Duhaime, la chef du Parti libéral du Québec Dominique Anglade, le co-porte-parole de Québec solidaire Gabriel Nadeau-Dubois, le chef du Parti québécois Paul St-Pierre Plamondon et le chef de la Coalition avenir Québec François Legault y ont participé.

Les commentateurs s’accordent pour désigner M. Legault comme le perdant de ce débat, alors que MM. Nadeau-Dubois et St-Pierre Plamondon se seraient démarqués. Pourtant, la CAQ s’en sort indemne dans un sondage paru la semaine suivante, alors que le PQ remonte la pente, mais reste bon dernier.

Le débat (discussions des cinq chefs de parti en face à face) est marqué par des moments de cacophonie et de vifs échanges autour du troisième lien Québec-Lévis, des taxes environnementales, de la pénurie de main-d’œuvre et de la protection du français.

Du fait des thèmes décidés par la chaîne, la question des aînés est abordée en profondeur une seule fois, pendant moins de cinq minutes, à propos des maisons des aînés. Plusieurs opposants à M. Legault annoncent qu’ils laisseront les constructions en cours se terminer, mais poursuivront d’autres politiques.

M. Nadeau-Dubois dit mettre le cap sur les soins à domicile, tout comme M. St-Pierre Plamondon, qui veut aussi créer un « protecteur des aînés » pour lutter contre la maltraitance. M. Duhaime promet de soutenir davantage les aidants naturels. Mme Anglade mentionne son allocation pour les aînés de 2000 $, en soulignant que les gens souhaitent rester vivre chez eux. M. Legault défend son bilan sur les soins à domicile, qui ont augmenté, mais souligne le besoin d’établissements spécialisés pour les personnes en perte d’autonomie.

« Pendant que vous démarrez votre projet parallèle de maison des aînés, dans les CHSLD existants, les gens ne vivent pas bien », rétorque M. Nadeau-Dubois.

Mme Anglade semble faire un effort particulier pour mentionner les aînés à d’autres moments : sur les aides pour lutter contre l’inflation (toujours l’allocation de 2000 $), l’accès prioritaire à un médecin de famille, et le retour des travailleurs expérimentés de plus de 65 ans sur le marché du travail.

Sur ce dernier point, MM. Duhaime et St-Pierre Plamondon soutiennent aussi des incitatifs fiscaux pour encourager les retraités en bonne santé à reprendre le travail (en réponse à une question sur l’âge de la retraite).

Enfin, notons dans le face-à-face entre M. Duhaime et M. Legault cet échange sur la gestion de la pandémie : « Vous n’avez pas été solidaire avec les personnes âgées », a répondu M. Legault, à propos des critiques de M. Duhaime sur les mesures sanitaires. « Vous n’avez pas été solidaire avec les Québécois et les enfants », lui répond ce dernier. Ils auront le même échange le 22 septembre.
 

Le deuxième débat

Le deuxième débat de la campagne électorale du Québec a pris place le 22 septembre. Le chef de la Coalition avenir Québec François Legault, la chef du Parti libéral du Québec Dominique Anglade, le chef du Parti québécois Paul St-Pierre Plamondon, le co-porte-parole de Québec solidaire Gabriel Nadeau-Dubois et le chef du Parti conservateur du Québec Éric Duhaime y ont pris part.

Sur le fond, ce dernier rendez-vous médiatique ressemble beaucoup au précédent, mais dans un style plus apaisé, où chacun et chacune parvient à mieux développer ses idées. Selon certains commentateurs, M. St-Pierre Plamondon se serait démarqué et Mme Anglade aurait amélioré sa performance.

On retient les joutes entre M. Legault et M. Nadeau-Dubois (en particulier sur les taxes « orange » de Québec solidaire), un certain manque de clarté de M. Legault autour du troisième lien Québec-Lévis, et une attaque de Mme Anglade déplorant le « recul pour les femmes » en raison du manque de places dans les garderies durant le mandat de la Coalition avenir Québec.

Une fois encore, on parle des aînés au détour d’une question sur le coût de la vie ou de la pénurie de main-d’œuvre. La seule discussion ciblée a lieu pendant quelques minutes, sur le thème de la santé, avec une question sur les besoins de soins à domicile (un sujet « extrêmement important aussi », dit le présentateur) et le coût des maisons des aînés.

On retrouve les mêmes arguments que le 15 septembre. M. Legault refuse d’opposer soins et maisons (« on a besoin des deux »), Mme Anglade met en avant son allocation non imposable, etc.         

M. Nadeau-Dubois a cette phrase marquante pour demander un virage national vers les soins à domicile : « Je n’accepte pas que la génération qui a construit le Québec, en ce moment, ait peur de vieillir », en raison de la situation des CHSLD.

M. St-Pierre Plamondon lui aussi enfonce le clou : « Les aînés sont une richesse pour notre société, il va falloir commencer à le dire et agir en conséquence, et donc les écouter. »