Le premier budget du premier ministre Mark Carney promet des investissements de construction nationale, tout en visant à réduire la fonction publique fédérale de 10 %.
Le premier budget du premier ministre Mark Carney est un peu contradictoire : austère pour la plupart d’entre nous, et pourtant généreux au sujet de ce que le gouvernement qualifie d’investissements « de portée historique » dans des projets de construction nationale.
« Nous ne faisons pas face à une transition, mais à un changement de portée historique. Un changement qui remet en question nos certitudes, met à l’épreuve nos institutions et exige une réponse fondamentalement différente, non pas marquée par la prudence, mais plutôt par le courage. L’heure n’est pas à la gestion passive, mais appelle à une volonté active et ambitieuse de bâtir le pays », écrit le ministre des Finances, François-Philippe Champagne, dans l’introduction du document.
La méthodologie repose sur deux cibles budgétaires : un budget équilibré d’ici 2028-2029 et le maintien de notre ratio du déficit au PIB enviable à la baisse. Le Canada s’enorgueillit de jouir du deuxième taux le plus bas des pays du G7, après le Japon, et d’une cote de crédit AAA, ce qui pourrait atténuer les inquiétudes liées au déficit projeté de 78,3 milliards de dollars de cette année.
Dans le cadre du budget de 2025, la fonction publique comptera environ 10 % d’employé·es de moins. « Après avoir atteint un sommet de près de 368 000 personnes en 2023-2024, le nombre d’employés de la fonction publique devrait atteindre environ 330 000 d’ici la fin de 2028-2029, soit une baisse d’environ 40 000 postes ou 10 % », pour citer le budget. « Cette évolution reflète l’attrition normale due aux départs à la retraite, aux départs volontaires et aux mesures d’économie précédentes, ainsi que les nouvelles mesures prises par le gouvernement pour ralentir les dépenses. »
Le budget indique également que « Pour réaliser ces économies, nous allons restructurer les activités, centraliser les services internes et optimiser les programmes afin de faire des gains d’efficacité. Un réaménagement des effectifs et l’attrition aideront aussi à ramener à une taille plus viable la fonction publique ».
Cependant, le DG de l’Association, Anthony Pizzino, souligne ceci : « En période d’incertitude, notre population croissante et vieillissante dépend d’une fonction publique efficace et fiable pour administrer les programmes et les mesures de soutien sur lesquels elle compte.
« Dans ce processus de réduction, le gouvernement affirme aussi vouloir minimiser les difficultés, protéger la diversité de la main-d’œuvre et assurer “une relève de fonctionnaires solides et plus jeunes”».
« Il est important de rappeler au gouvernement la force et la valeur du travail réalisé quand les générations plus âgées et plus jeunes collaborent », ajoute M. Pizzino.
Le budget propose un programme volontaire d’encouragement à la retraite anticipée pour les personnes âgées de 50 ans (ou de 55 ans si elles ont été embauchées après janvier 2012) et plus, avec 10 années d’emploi. Ce programme sera financé par la Caisse de retraite de la fonction publique, à un coût de 1,5 milliard de dollars. Cela signifie que les cotisations des employé·es et retraité·es subventionneront ces départs. Le gouvernement prévoit aussi des coupes dans le programme de pension d’invalidité de la Gendarmerie royale du Canada (GRC), à hauteur de 5,8 milliards de dollars sur quatre ans. La mention Indexer les pensions d’invalidité de la GRC à l’indice des prix à la consommation se trouve dans l’Annexe 5 du budget. Le gouvernement mentionne aussi que ces « modifications législatives ou réglementaires proposées permettraient de clarifier la formule d’indexation des prestations d’invalidité et des avantages connexes pour les membres des FAC, les anciens combattants et les membres actifs et retraités de la GRC (y compris rétroactivement). »
« L’Association surveillera de près tout changement législatif et s’adressera à la ministre, pour clarifier cette mesure et protéger les prestations des vétérans », a mentionné M. Pizzino, par rapport à cette mesure.
De nouvelles économies seront réalisées par l’Examen exhaustif des dépenses (EED), qui vise 4,9 % d’économies : 9 milliards de dollars en 2026-2027, 10 milliards de dollars en 2027-2028 et 13 milliards de dollars en 2028-2029. Combinées aux autres économies et revenus du budget de 2025, cela totalisera 60 milliards de dollars sur cinq ans, à partir de 2025-2026.
Un nouveau Bureau de la transformation numérique est en cours de création, pour diriger l’adoption de l’intelligence artificielle (IA) et d’autres technologies, afin de rationaliser les opérations gouvernementales. Cela signifie améliorer l’efficacité des fonctions de routine et d’ordre administratif, ainsi qu’introduire l’IA pour certaines tâches encore non définies.
Le budget promet aussi de limiter les voyages discrétionnaires et le recours aux consultant·e·s, pour économiser 25,2 milliards de dollars sur quatre ans. Plus précisément, les services de gestion et de consultation seront réduits de 20 % en trois ans.
Le gouvernement indique que plusieurs changements de programmes, qui ne sont pas encore annoncés, permettront de rationaliser la prestation des services et de réduire les dépenses de 17,5 milliards de dollars sur quatre ans.
Le grand livre promet aussi, par contre, des investissements majeurs. Le gouvernement dépensera 25 milliards de dollars pour le logement sur cinq ans, construisant 4 000 maisons préfabriquées et 45 000 nouveaux logements. Les Forces armées canadiennes (FAC) recevront 81,8 milliards de dollars pour reconstruire, réarmer et réinvestir à la fois dans le personnel et les infrastructures, tandis que la défense et la sécurité bénéficieront d’investissements de 30 milliards de dollars sur cinq ans. Ces fonds réservés à la défense signifient que le Canada atteindra cette année sa cible de dépenses de 2 % de l’OTAN, cinq ans plus tôt que prévu.
Sur une période de cinq ans, le gouvernement consacrera 115 milliards de dollars à des projets d’infrastructure, dont un réseau d’électricité propre et un train à grande vitesse, ainsi que 110 milliards de dollars en initiatives pour stimuler la productivité et la compétitivité.
On espère que ces dépenses stimuleront 500 milliards de dollars supplémentaires en investissements privés au cours de ces cinq années.
Le budget comprend seulement des mesures limitées pour les Canadien·ne·s âgés et bien peu pour répondre aux besoins plus considérables d’une population vieillissante.
Le budget de 2025 comprend du soutien financier pour les préposés aux services de soutien à la personne, sous forme d’un nouveau crédit d’impôt remboursable égal à 5 % de leurs revenus, jusqu’à 1 100 dollars par personne.
Cependant, on n’y retrouve pas d’engagements pour véritablement remédier aux lacunes des soins de longue durée.
« Il est décevant que le budget ne mentionne pas de loi sur les soins de longue durée sécuritaires, un engagement du gouvernement précédent », déclare M. Pizzino. « Améliorer les soins de longue durée et établir des normes nationales contraignantes en la matière demeure une priorité de l’Association. »
De nouvelles mesures pour lutter contre la fraude financière ont été instaurées. Des modifications à la Loi sur les banques ont également été proposées, pour protéger contre la fraude visant les consommateur·trice·s. Une Stratégie nationale antifraude pangouvernementale rassemblera les institutions financières, ainsi que les entreprises des domaines des technologies et des télécommunications, afin de développer une approche intersectorielle pour protéger la population canadienne contre des stratagèmes de fraude évolutifs et complexes.
Le gouvernement autorisera aussi l’ARC à produire des déclarations de revenus au nom des Canadien·ne·s à faible revenu admissibles. L’ARC reçoit également des fonds pour investir dans l’IA, un domaine à surveiller pour d’éventuels problèmes imprévus.
On propose de mener des consultations sur les changements aux prestations de retraite du secteur public. Pour être admissibles au Régime de services dentaires des pensionnés, les employé·e·s devront désormais compter six ans de service, au lieu de deux. Cela ne touche pas les membres actuels du régime. Les membres de la fonction publique fédérale, de la GRC et des FAC verront leurs cotisations de pension réduites, pour tenir compte des améliorations apportées à leurs cotisations au RPC/RRQ depuis 2019. Cela augmentera les passifs du régime de pension. « Retraités fédéraux s’attend à participer à ces consultations », précise M. Pizzino.
Le budget de 2025 réaffirme la décision d’élargir l’admissibilité à la retraite anticipée à des travailleur·euse·s de première ligne fédéraux. « Après des années de démarches de défense des intérêts menées par l’Association et des parties prenantes, le gouvernement a accepté ce changement en 2024 », rappelle M. Pizzino. « Nous sommes heureux de le voir enfin progresser dans ce budget. »
Le budget comporte de bonnes nouvelles pour les vétéran·es. Le budget de 2025 propose d’affecter 184,9 millions de dollars sur quatre ans, à partir de 2026-2027, et 40,1 millions de dollars de façon permanente à Anciens Combattants Canada, pour stabiliser la capacité de traitement des demandes de prestations d’invalidité et moderniser les processus opérationnels et l’infrastructure de TI de son programme de prestations d’invalidité. « Retraités fédéraux a réclamé cet investissement pour garantir que les vétérans aient un accès rapide aux prestations auxquelles ils et elles ont droit », explique M. Pizzino.
« Selon ce budget, il est clair que le Canada a besoin d’un plan plus solide et complet pour s’assurer que chaque personne aînée puisse bien vieillir et prendre sa retraite avec une sécurité financière », conclut M. Pizzino. « C’est notre objectif : veiller à ce que les décisions gouvernementales répondent aux besoins de nos membres et de la population canadienne âgée. »